Des jardins accessibles (accessibilité)

Des jardins accessibles (accessibilité)

Il n’est pas nécessaire de s’attarder sur l’évidence : le propre d’un jardin thérapeutique est d’être accessible à ses usagers, et donc d’être conçu de telle manière que les troubles fonctionnels, moteurs, psychiques, sensoriels ou mentaux qu’ils peuvent présenter ne les empêchent pas d’en profiter.

Le choix d’une conception universelle

On peut concevoir un jardin en ne pensant qu’aux caractéristiques de ses usagers principaux. Mais alors, quelle ouverture, quelle hospitalité pour les autres ?

On peut donc plutôt s’inscrire dans une perspective de « conception universelle », et chercher à proposer, au-delà de ce que seraient des aménagements liés à telle ou telle population, à tel ou tel trouble, un jardin qui permette au plus grand nombre, quelle que soit la situation de chacun, d’en profiter, d’y agir, etc.

On trouve de très nombreuses ressources sur l’internet au sujet de la « conception universelle » (« universal design » ou « design for all »).

En voici une définition très générale, proposée par la fondation Design for all :
« Conception d’environnements, produits et services afin que toutes les personnes, futures générations incluses, sans distinction d’âge, de genre, de capacité ou d’origine culturelle, puissent avoir les mêmes opportunités de comprendre, d’accéder et de participer pleinement aux activités économiques, sociales, culturelles et de loisirs, de manière la plus indépendante possible. »

Sept principes

On retrouve souvent sept principes pour guider ces démarches de conception universelle, qui vont irriguer, sous cette forme ou une autre, les recommandations que nous suivrons dans les jardins thérapeutiques :

  • Utilisation égalitaire : le jardin et le jardinage seront accessibles à des personnes ayant différentes capacités. Si des activités ne peuvent être identiques, chercher à proposer des équivalents.
    • Précision : cela signifie bien qu’il ne s’agit pas de ne proposer que des activités accessibles à tout le monde et de (se) refuser une activité sous prétexte que tout le monde ne peut pas la faire… En revanche, cela nous oblige bien à penser : si ces personnes-là ne peuvent faire cette activité-là, quelle autre activité leur proposer qui leur permet de trouver de semblables plaisirs et intérêts ?
  • Flexibilité d’utilisation : proposer le plus de choix possible, avoir une palette importante de propositions selon les capacités mais aussi les préférences, etc.
  • Utilisation simple et intuitive : on peut profiter du jardin et du plus possible d’expériences qu’il propose, s’y repérer, s’y promener, etc., sans avoir besoin de connaissances ou de compétences particulières.
  • Information perceptible : les informations nécessaires pour profiter du jardin sont travaillées de telle manière qu’elles sont bien perçues. Elles utilisent différents modes (verbal, graphique, tactile…), afin notamment de répondre aux personnes ayant des troubles des capacités sensorielles.
  • Prévention des risques : réduction des dangers mais aussi réduction des conséquences négatives des erreurs. (Par exemple, si une personne se trompe à un carrefour, faire en sorte que le mauvais chemin qu’elle prend ne l’emmène pas dans un endroit qui la perde et d’où elle ne puisse facilement revenir.)
  • Effort physique minimal : l’utilisation classique du jardin (autrement dit, hors cadre d’activités particulières…) est confortable et ne cause pas de fatigue.
    • Précisons, pour éviter tout malentendu : que les personnes qui aiment justement se fatiguer au jardin, y faire des efforts, etc., doivent pouvoir le faire ! (Mais c’est bien un choix de leur part, ce n’est pas l’environnement qui le leur impose…)
  • Dimensions et espaces adaptés : les usagers peuvent profiter du jardin, y bouger, y mener des activités, même quand ils ont besoin de plus d’espace que d’autres pour le faire parce qu’ils utilisent une aide technique ou humaine.
Favoriser sans discriminer

En s’inscrivant dans cette perspective de conception universelle, on s’inscrit donc bien dans une perspective anti-discriminante. Elle passe notamment par la réflexion et la réalisation de dispositifs qui, pour être adaptés à certaines personnes (par exemple des dispositifs de culture en hauteur pour des personnes ne pouvant jardiner qu’assises) peuvent aussi être réalisés de telle façon qu’ils soient pratiques pour tout le monde.

La représentation qu’un dispositif est “fait pour les malades”, “fait pour les handicapés”, est à pourchasser : elle conduit à séparer les publics, accentuer les regards discriminants sur les usagers, faire perdre aux personnes (y compris à celles pour lesquelles il est conçu) le désir de les utiliser.

Le jardin permet, nous y reviendrons dans plusieurs des pages consacrées aux recommandations concrètes, de presque toujours concevoir et utiliser des dispositifs qui :

1/ sont à la fois nécessaires pour certaines personnes (par exemple un carré potager surélevé pour des personnes qui ne peuvent pas se mettre debout) et très confortable pour les autres (certaines personnes qui pourraient jardiner debout mais au prix d’une fatigue ou d’un risque importants (ce qui concerne presque tout le monde !).) ;

2/ sont de surcroît esthétiquement intéressants (les mille et une jolies manières de faire un carré potager surélevé, en bois, en pierre, en plessis, etc.) et intéressants aussi d’un point de vue éco-jardinage (ce n’est pas un hasard si la culture en hauteur était pratiquée dans les jardins de simples dès le moyen-âge, où de nombreux  moines faisaient de la permaculture sans le savoir 🙂

L’utile contre le beau ?

L’accessibilité, l’adaptation, ne doivent en effet pas servir de prétextes pour abandonner tout souci esthétique, toute ambition que chaque dispositif soit bien intégré dans le jardin !

Ce point est important : car on voit bien souvent le jardin perdre sa nature de jardin (support de plaisirs esthétiques, de rêverie, de relations avec les éléments naturels…) à force de n’être plus qu’un sol sur lequel sont posés des dispositifs, aussi laids qu’utiles, pour servir à telle ou telle activité.

S’il est nécessaire

  • de disposer de certains éléments adaptés pour le jardinage ;
  • de posséder pour certaines personnes et dans certains jardins des éléments utiles pour des activités rééducatives, sportives, etc. ;
  • de proposer à certaines personnes des supports particuliers, pour des expériences sensorielles, psychiques, physiques, qu’elles ne peuvent aller chercher dans le jardin ;

cela ne justifie pas pour autant de laisser ces éléments devenir les points qui attirent les regards et modèlent la représentation du jardin en jardin “d’ehpad” / “pour handicapés” / “de rééducation” / etc.

 


Sommaire de la sous-rubrique “Grands principes et grandes dimensions” :

  1. Introduction
  2. Des jardins supports d’autonomie
  3. Des jardins de liberté et de sécurité
  4. Des jardins accessibles (accessibilité)
  5. Des jardins pour l’intimité et la sociabilité
  6. Des jardins de bien-être et de confort
  7. Des jardins supports de sensations
  8. Des jardins supports de rêverie(s)
  9. Des jardins supports d’activités
  10. Des jardins supports de créativité
  11. Des jardins supports d’échanges
  12. Des jardins supports de prendre-soin
  13. Des jardins surprenants et familiers
  14. Des jardins participatifs
  15. Des jardins sains et durables
  16. Des jardins naturels (permaculture, ecojardinage)

 

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